Un des avantages de la mondialisation et du développement exponentiel des moyens de diffusion de l’information est de rendre transparent le monde. Les grandes puissances ne peuvent plus comploter à notre insu. Tout se sait ou se devine lorsque l’on se donne la peine de suivre l’actualité et de lire entre les lignes des journaux télévisés des médias planétaires.
En cette période de déstabilisation de l’Afrique et de ses grands ensembles, par ces temps de mutations en profondeur des équilibres géopolitiques mondiaux, il serait intéressant de prêter une oreille attentive à tous les débats mettant en scène ( ?) des «spécialistes de l‘Afrique» et autres gourous stratégistes, marchands d’armes à l’occasion. Bonimenteurs et, bien des fois menteurs tout simplement, ça disserte sur l’Afrique et ses populations avec un aplomb qui serait touchant s’il n’était anachronique. L’Afrique dont parlent certains n’existe plus que dans les pages jaunies des livres d’histoire coloniale. L’Afrique d’aujourd’hui est hors de ces schémas et clichés réducteurs du paternalisme de l’école de Jean Dard.
À ceux qui nous veulent tellement de bien qu’ils ne trouvent comme solution à nos problèmes que la diminution du nombre des habitants du Continent ;
À eux qui ne vivent que par les politiques de ralentissement des naissances qui donnent pourtant sens à la vie ;
Je demande : où seraient ceux qui nous préparent ce funeste destin si leurs parents avaient choisi de ne pas les porter à la vie ?
Misère de la pensée qui tourne à vide… Par vanité et incompétence. Par méchanceté aussi.
Car, contrairement aux avis doctes et péremptoires des «spécialistes de l’Afrique», le Continent n’est ni surpeuplé, ni pauvre. Il est juste mal dirigé par des hommes et des femmes qui se trompent de sujet : continuer, voire consolider la balkanisation de l’Afrique sur le modèle du partage de Berlin est la première trahison des élites dirigeantes du Continent ! Le projet de l’Organisation de l’Unité Africaine, porté par les pères fondateurs de nos indépendances, était le plus sensé et le plus déterminant pour offrir un avenir radieux à nos populations en perpétuelle croissance. Par des complots et des assassinats dont aujourd’hui on sait les tenants, les aboutissants et les protagonistes, les élites les plus lucides du Continent ont été mis hors de course par une main…invisible( !) Cette main que les jeunesses africaines appellent désormais « le système »… En être ou ne pas en être. Voici l’équation pour ne pas parler comme Shakespeare !
Il appartient maintenant aux intellectuels et penseurs du Continent de transformer les cris de détresses des jeunes à l’assaut des océans en un horizon radieux. Par l’invention d’un modèle de progrès digne des ressources naturelles et humaines dont l’Afrique regorge. Les états lilliputiens où trônent des monarques éborgnés en mal de mandats éternels doivent céder le pas à de grands ensembles, cohérents au plan historique, culturel et social. La CEDEAO, sous ce rapport avait une longueur d’avance ! Et ne voilà t-il pas que la main invisible, «le système» autrement dit, cherche à détruire ce que des années d’efforts diplomatiques ont construit ? L’aventure punitive au Niger serait, à cet égard, catastrophique. Et, dire cela ne veut pas dire soutenir un putsch ! Comme certains intelocrates voudraient le faire croire. Dire cela, c’est prendre le temps de comprendre qu’à chaque fois que les militaires interviennent, c’est le signe d’un échec collectif de la société civile et politique ! Lorsque la classe politique, pouvoir et opposition, ne parvient plus à dialoguer avec sincérité et bonne foi, lorsque le désordre institutionnel devient une arme aux mains des pouvoirs, alors c’est le début de la tyrannie qui ouvre la voie au bruit des chars, le crépitement des armes… Intelligences en berne, la bêtise peut prendre le pouvoir !
Tout cela étant dit, nous n’avons jamais été aussi proches de l’Indépendance ! La vraie !
Il est temps d’en prendre véritablement conscience pour sortir de la simple contestation et arracher les chaînes de nos destinées. L’occurrence des réseaux sociaux et des outils de communication sans frontières qui en découlent sont une Grâce pour les peuples opprimés d’Afrique.
Parlons-nous au lieu d’écouter ceux qui parlent de nous ! Construisons notre Continent au lieu d’attendre l’aide des autres.
Amadou Tidiane WONE
PS : Revenant d’une tournée au nord du Sénégal au cœur du Fouta, j’ai vu des initiatives individuelles qui, si elles se multipliaient, feraient de la région du fleuve un grenier pour la sous-région et un pôle d’exportation de produits agricoles vers l’Europe et au-delà… Encore faudrait-il que les politiques publiques soutiennent les entrepreneurs locaux… Les vrais ! N’est-ce pas Abdoul ?