Rapports 2019, 2020 et 2021
L’Ofnac donne raison à Sonko, Mamour Diallo dans de sales draps
A la suite d’une enquête rondement menée, l’OFNAC a confirmé les accusations du leader de Pastef contre Mamour Diallo. Le dossier transmis au Parquet avec de lourdes charges contre l’ancien directeur des Domaines a été mis sous le coude par le Procureur.
Le nouveau président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a ordonné la publication des rapports de l’Inspection générale d’Etat, de l’Ofnac et de la Cour des comptes portant sur les cinq dernières années. Dans ce cadre, « Le Témoin » réussi à se procurer les rapports de l’Ofnac (Office national de lutte contre la fraude et la corruption) portant sur la période allant de 2019 à 2021. Les investigations faites par ce corps de contrôle ont permis de déceler des failles au niveau de la gestion de certaines entités publiques. Nous avons parcouru quelques dossiers comme celui qui avait défrayé la chronique et portant sur le différend ayant opposant Ousmane Sonko, aujourd’hui Premier ministre, à Mamadou Mamour Diallo portant sur les 94 milliards provenant de la vente d’un terrain à l’Etat mais aussi sur la pandémie du Covid 19 entre autres…
En 2019, 10 rapports d’enquête ont été finalisés dont 5 transmis aux autorités judiciaires. Parmi eux il y a celui relatif à la plainte contre le directeur des Domaines de l’époque, Mamadou Mamour Diallo, signée par le député au moment des faits Ousmane Sonko. Dans cette plainte, le leader de Pastef dénonçait des faits supposés de « transactions immobilières irrégulières et de détournements de deniers publics » portant sur un montant de 94 783 159 000 FCFA. Une affaire qui avait fait les choux gras de la presse. Voici les faits tels qu’énoncés dans le rapport: « Il ressort de l’enquête menée que le TF 1451/R d’une contenance de 258 hectares sis à Rufisque et inscrit au nom de « feu Ousmane MBENGUE », avait été vendu, par actes notariés, à la société immobilière « SAIM INDEPENDANCE », dans les années 1978 et 1979. En 1988, cette société immobilière, dans le cadre d’un échange, a accepté de l’Etat du Sénégal un terrain d’une superficie de 01 ha 49a 50 ca sis à Mermoz, distrait du TF 5725/DG, contre 132 hectares environ, amputés du TF 1451/R. Au terme de cet échange, autorisé suivant acte administratif, ces 132 ha, environ, ont été immatriculés TF 2887/R au nom de l’Etat du Sénégal. Plus tard en 1997, la SN HLM, suite à une expropriation pour cause d’utilité publique, portant sur l’assiette foncière reliquataire du TF 1451/R, a bénéficié des 125 hectares restants en vue d’y édifier son projet de « Parcelles assainies Keur Massar-Rufisque ».
A cet effet, la SN HLM a affirmé avoir dédommagé, en retour, la SAIM INDEPENDANCE, moyennant la somme de six cent cinq millions huit cent cinquante-trois mille cinq cent (605.853.500) frs CFA, par un chèque que le Directeur Général de la société destinataire, Monsieur Amadou Makhtar MBAYE, a déclaré n’avoir jamais reçu. Ayant contesté l’acquisition du TF 1451/R parla « SAIM INDEPENDANCE », effectuée dans les années 1978 et 1979, les héritiers de « Feu Ousmane MBENGUE » ont saisi la Justice contre cette société immobilière pour obtenir plus tard, suivant arrêt de la Cour d’Appel de Kaolack en date du 09 février 2012 : l’annulation de cette vente ; la radiation de l’inscription de « SAIM INDEPENDANCE » dans les livres fonciers de Rufisque concernant le TF 1451/R et l’inscription des droits des requérants sur les 258 ha du TF 1451/R après l’avoir remis dans son état d’avant les années 78 et 79. Toutefois, les héritiers se sont rendus compte que leurs droits patrimoniaux n’ont été reconduits, par la Conservation foncière de Rufisque, que sur les 125 hectares restants du TF 1451/R déjà occupés par la SN HLM et non sur l’ensemble des 132 hectares devenus le TF 2887/R. Désirant se faire indemniser par l’Etat du Sénégal sur la totalité de la surface du TF 1451/R, à savoir sur les 258 hectares, les ayant-droit ont effectué les démarches nécessaires. Une première demande d’indemnisation concernant les 125 ha a été alors introduite et le dossier y relatif a atterri à la Commission de Contrôle des Opérations Domaniale (CCOD) qui, en sa séance du 19 janvier 2016, approuvée le 22 suivant, a suspendu l’affaire avec comme observations : « Réinstruire par rapport à la première expropriation – Avis SN HLM sur les circonstances de l’occupation ». Depuis lors la CCOD n’est plus informée, encore moins saisie du cas du TF 1451/R d’après son président. Voulant contourner les exigences de la CCOD, les représentants des familles héritières, à l’exception du sieur Djibril DIAL, ont été mis en contact avec le nommé Seydou dit Tahirou SARR, Directeur général des sociétés SOFICO et CFU, qui leur a proposé d’acquérir leurs « droits, actions et créances » sur le TF 1451/R dans son intégralité totale (258 ha), au prix de deux milliards cinq cent millions (2.500.000.000) frs CFA, qu’il payerait plus tard en plusieurs tranches, nonobstant le refus du contestataire, Monsieur Djibril DIAL.
Selon l’acheteur, le sieur Tahirou SARR, l’acte de cession effectué sous-seing privé a été présenté aux Impôts et Domaines pour le paiement des taxes fiscales au montant de 25 millions de FCFA, avant d’être déposé auprès du Notaire Maitre Ndèye Lika BA en l’an 2016, en dépit du refus d’homologation prononcé en première instance et en appel par le Tribunal de Grande Instance Hors Classe (TGIHC) de Dakar, du fait du caractère lésionnaire de la transaction, objet de la contestation d’une partie des héritiers.
En outre, le Directeur général de SOFICO, le sieur Seydou SARR, a reçu une lettre de notification de redressement fiscal à propos de l’acte de cession, de la part du Bureau du Contrôle Fiscal qui, fustigeant le taux d’enregistrement de 01% appliqué sur le prix d’achat, soit 25millions de frs CFA, a rappelé que la cession concernée porte sur un bien immobilier, voire sur des droits réels et doit être taxée au taux de 05% en matière de droits d’enregistrement, soit 125 millions de frs CFA, y compris les pénalités de redressement. Toutefois, le Sieur SARR, hormis les 25millions de frs CFA tantôt évoqués, n’a rien versé au Service public requérant. Le sieur Seydou SARR, voulant se faire indemniser, à son tour, par l’Etat du Sénégal, après s’être substitué aux familles héritières, a entamé une procédure administrative, qui a atterri à la réunion de la Commission de Conciliation et d’Evaluation du montant de l’indemnisation, initiée par le Gouverneur de Dakar, le 21 août 2017 à laquelle ont pris part le cessionnaire et le chef du Bureau des Domaines de Ngor-Almadies-Grand-Dakar, le sieur Meïssa NDIAYE. Cette réunion de la Commission de conciliation, tenue sans l’avis préalable et obligatoire de la C.C.O.D., a fait endosser à l’Etat du Sénégal le montant de quatre-vingt-quatorze milliards sept cent-quatre-vingt-trois millions cent-cinquante-neuf mille (94.783.159.000) frs CFA, soit le prix de trente-sept mille (37 000)frs CFA par mètre carré, à payer au sieur Seydou SARR, en guise d’indemnisation suite à l’expropriation décidée sur les 258 hectares du TF 1451/R.
Selon le nommé Meïssa NDIAYE, chef du Bureau des Domaines de Ngor-Almadies-Grand-Dakar, les deux actes d’acquiescement relatifs au paiement des 94.783.159.000 frs CFA au profit des sociétés SOFICO et CFU de Seydou SARR, ont été établis et signés par l’ancien Directeur des Domaines, Mamadou Mamour DIALLO, pourtant membre et rapporteur de la C.C.O.D, sur la base des procès-verbaux de la réunion de la Commission de Conciliation, rédigés par ses soins.
Le dénonciateur, Ousmane SONKO, ayant suspecté « une machination aux fins de détournement de deniers publics » notée dans cette procédure d’indemnisation, a relevé plusieurs anomalies, notamment : ‒ le refus d’homologation du PV de conciliation par le Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar confirmé par la Cour d’Appel suivant arrêt n°04 du 11/01/2018 ; ‒ la substitution des droits réels sur le TF 1451/R de la famille héritière en de supposées créances que le sieur Seydou SARR aurait acquises par l’acte de cession rejeté par l’arrêt judiciaire sus-indiqué ; ‒ la désignation de Seydou SARR comme exproprié dans les deux actes d’acquiescement alors qu’il n’a jamais été propriétaire sur le TF 1451/R ; ‒ l’absence de la SN HLM à cette réunion de conciliation, nonobstant son implication dans le TF 1451/R, qui y a inscrit une pré-notation suivant ordonnance n°1036/013 du 12 juin 2013 délivrée par le juge du tribunal hors classe de Dakar ; – le fort barème d’indemnisation au mètre carré (à savoir 37.000 FCFA/m²) retenu lors de cette réunion de conciliation, qui est supérieur à celui proposé aux victimes du projet « TER » alors qu’elles sont situées dans la même zone foncière (réf : le décret 2010-439 du 06 avril 2010 fixant le barème du prix de terrain nu ou de terrain bâti. Ce décret propose dans la zone de Keur Massar 27.000 FCFA/m² pour les terrains viabilisés et 15.000 frs CFA pour les terrains non viabilisés ». Les investigations menées par l’Ofnac ont permis de confirmer la quasi-totalité des griefs soulevés par le plaignant.
Dans leur conclusion, les enquêteurs de l’organe de contrôle croient que toutes les entorses à la procédure régulière « pourraient faire penser à une volonté inavouée des fonctionnaires concernés de tirer le maximum de profit pour SOFICO et CFU dans une seconde procédure d’indemnisation, tout en sachant qu’il y a eu un premier cas d’expropriation ayant abouti à une indemnisation portant sur le montant de 605.853.850 frs CFA. Les éléments de fait ci-dessus relatés pourraient permettre de retenir les infractions suivantes: ‒ association de malfaiteurs, fait prévu et réprimé par les articles 238 à 240 du Code Pénal ; ‒ escroquerie portant sur des deniers publics, fait prévu et réprimé par les articles 152 à 154 du Code Pénal ‒ tentative d’escroquerie portant sur des deniers publics ‒ complicité d’escroquerie portant sur les deniers publics .
L’Ofnac a par la suite transmis le dossier au Procureur de la République. Outre cette plainte, d’autres comme celle du collectif des membres de l’Amicale de la 23e promotion des élèves gendarmes contre le Président, le Secrétaire général et le Trésorier de ladite association, ou le collectif des habitants de la cité Salama sise à Rufisque-Est contre la famille « feu El hadji Mamadou NDOYE » et autres pour des faits supposés de tentative de corruption et d’occupation sans droit, ni titre, de terrains ont été traités par l’organe de contrôle.
Par Le Témoin