Campagne électorale : le respect d’un traitement égal entre les candidats, une impérieuse nécessité, par Doudou Sow

L’élection présidentielle est un moment important dans l’histoire démocratique d’un pays. Pour cette raison, elle exige une transparence et une égalité des chances entre tous les candidats pour une meilleure prise en compte des votes de tous les citoyens, peu importe leur choix politique. Le dossier du candidat Bassirou Diomaye Faye qui ne fait l’objet d’aucune condamnation définitive est même plaidé par des organisations internationales tel que le rapporte le journal Les Échos qui révèle une demande de libération du candidat introduite auprès du Groupe de travail des Nation-Unies par la Fondation des droits de l’homme (HRF). « Tous les candidats doivent être soumis au principe constitutionnel de l’égalité de traitement. C’est pourquoi la libération sans délai du candidat Bassirou Diomaye Diakhar Faye est une exigence populaire et respectueuse de la Constitution », indiquait le communiqué de la Coalition Diomaye Président le 18 février dernier.

Rappelons-nous aussi que la Une de RFI du 1er février 2024 « Présidentielle au Sénégal : « Les candidats doivent pouvoir faire campagne en toute égalité », dit la mission de l’UE- l’Union européenne » mettait déjà en exergue la nécessité d’une égalité entre les candidats de la Présidentielle. Le Sénégal se retrouve devant un scénario inédit : un candidat et probable prochain président Bassirou Diomaye Faye qui doit battre campagne depuis la prison.

Après avoir martelé sa « volonté de pacification de l’espace public et d’organiser des élections transparentes », on voit nettement que la parole du président évolue au gré des circonstances. Quand on sait l’hyperprésidentiable auquel le candidat Diomaye veut s’attaquer, la mainmise du président Macky Sall sur tous les leviers de l’État fait de telle sorte que toutes les décisions importantes sont entérinées par lui-même. Inutile de faire croire au monde entier à la séparation des pouvoirs sous le règne du président Macky Sall. « Le pays a été fortement affecté ces 12 dernières années par une crise sans précédent des institutions. L’hyperprésidentialisme avec comme corollaire une mainmise de l’exécutif sur le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire est la principale tare de notre système politique. Nous avons assisté à une judiciarisation de l’espace politique par le Président de la République qui a fait de la justice un levier pour emprisonner et éliminer ses opposants des joutes électorales », peut-on lire dans les réformes du candidat antisystéme en prison Bassirou Diomaye Faye. On pensait que le président Macky Sall, en fin de mandat, était dans une logique de gestes d’apaisement allant dans le sens « mieux vaut tard que jamais », qu’il allait enfin corriger le tir pour soigner sa sortie ratée mondialement reconnue, mais décidément il ne veut pas être du bon côté de l’histoire. L’ancien Secrétaire général d’Amnesty International Pierre Sané a raison de dire que « Le président Macky Sall ne saurait nous surprendre que si nous attendions de lui des postures d’un président de la République. Donc, on ne peut pas le juger à l’aune d’ambitions “glorieuses » qu’il n’arbore pas. Il n’est ni Senghor, ni Diouf, ni Wade. »

Pour la première journée de la campagne électorale, le dimanche 10 mars, le Conseil national de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) a retiré le temps d’antenne de 3 mn à la Radio télévision sénégalaise (RTS) de Bassirou Diomaye Diakhar FAYE pour des raisons ou considérations peu convaincantes. « Le temps d’antenne est réservé aux candidats en lice à la Présidence de la République figurant sur la liste arrêtée et publiée par le Conseil constitutionnel ». Une réponse similaire déjà servie le 29 janvier dernier par le président du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) Babacar Diagne lorsqu’il rencontrait les mandataires des candidats sélectionnés pour la Présidentielle.

La déclaration du directeur de campagne Moustapha Guirassy enregistrée le samedi 09 mars n’a finalement pas été diffusée par la chaîne publique, la RTS. Selon l’expert Mountaga Cissé, expert en nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). « Le CNRA a outrepassé ses prérogatives. » Le formateur médias numériques poursuit en ces termes : « Même si la Loi électorale est claire sur le fait que le temps d’antenne est réservé aux candidats en lice, en l’absence de la prise de parole dudit candidat, la plage qui lui est dédiée lui appartient entièrement. S’il décide qu’un ÉCRAN NOIR doit être affiché pendant trois minutes, ce choix doit être respecté. Le zapper complètement constitue une rupture d’égalité qui est contraire à la Loi.

La preuve, si un candidat s’exprime pendant 2 mn 50 secondes, il va lui rester 10 secondes. Et bien ces 10 secondes, il ne les perd pas. C’est son bulletin (spécimen) qui est affiché pour compléter son temps d’antenne. » Mountaga Cissé, expert en NTIC. Il invite « la Coalition Diomaye Président (à) saisir sans délai la Cour d’Appel pour arbitrage comme le prévoit l’Article LO 130 de la Loi électorale », conclut le cofondateur et directeur Associé SIMTECH Media Editeur Digital 24.

Peu importe les manœuvres mises en place pour stopper la montée en puissance du bras droit d’Ousmane Sonko, la coalition Diomaye Président se renforce de jour en jour. Plus de 118 partis et mouvements, et pas n’importe lesquels, s’y sont déjà ralliés. Pendant que la télévision publique, la RTS censure le temps d’antenne de celui qui a de réelles chances de remporter la présidentielle, des scènes de jubilation des partisans de Diomaye qui ont démarré symboliquement leur campagne chez le leader Ousmane Sonko ont été montrées particulièrement par la chaine TV5 Monde dans son dernier reportage.

Une très forte mobilisation ou un tsunami de la coalition Diomaye Président contraste avec le flop observé chez le camp présidentiel dans ce début de campagne électorale écourtée.

Comme on le dit souvent en wolof « Thine bou narè nekh, sou bakhè dafay khègn nèkh ». Une bonne ou mauvaise entrée en matière dans cette campagne électorale pourrait marquer les esprits. Une démonstration de force de la coalition Diomaye Président donne le ton de la campagne électorale. Le début de campagne du camp présidentiel qui connaît un flop contraste avec celui de la coalition Diomaye Président portée par des opposants et des membres issus de la société civile notables.

Une très forte mobilisation du candidat de la jeunesse et de l’espoir Bassirou Diomaye Faye relayée par les réseaux sociaux, certains médias locaux et internationaux a de quoi faire peur ou troubler le sommeil du camp présidentiel. Une foule impressionnante qui est un indicateur de la détermination des électeurs à faire triompher dès le premier tour le candidat désigné par le leader Ousmane Sonko en l’occurrence Bassirou Diomaye Faye. « Coup d’envoi de la campagne électorale-Mobilisation monstre au terrain Acapes-Les Patriotes cassent la baraque », barre la Une de Yoor-Yoor du 11 mars. « Lancement de la campagne de Diomaye Faye. Une coalition XXL et une grosse mobilisation », titre L’info du 11 mars dans sa Une.

Le titre de PressAfrik en dit également long sur l’état d’esprit et l’engouement des différentes coalitions « Démarrage de la campagne: Amadou Ba lâché par l’APR (L’Alliance pour la République), excepté Pape Malick Ndour, aucun ministre en fonction n’a pris part à ce rendez-vous (avec en plus le meeting de Mbacké annulé) » (11 mars 2024). « Présidentielle 2024 : Amadou Ba aurait-il été « abandonné » par Benno et Apr en pleine campagne ? », s’interroge le journal Xalimasn dans son édition du 11 mars. « Le lancement de la campagne d’Amadou Ba à Mbacké, prévu par un meeting inaugural, a été contrecarré par le refus des responsables locaux de le recevoir, craignant les représailles du président Macky Sall. Ce malaise au sein de l’APR entrave la dynamique de la campagne, avec des responsables désemparés et des contraintes multiples. Amadou Ba, laissé à lui-même, tente de forger sa propre voie, mais se heurte à un personnel non politique. (…) Amadou Ba devra surmonter de nombreux obstacles, alors que l’APR semble paradoxalement saper ses propres fondements. »

Le « programme 1.5.15, à travers lequel [le candidat Bassirou Diomaye Faye] compte mettre en œuvre [s’appuie sur une] vision articulée autour de cinq (5) grandes orientations déclinées en quinze (15) axes et chaque axe comporte plusieurs actions à mettre en œuvre. » Le programme politique intitulé « Yoonu Dëgg » « visera (pour les 5 prochaines années) à consolider les institutions démocratiques, à repenser le système judiciaire et à améliorer la gouvernance des ressources naturelles. » La coalition Diomaye Président, par la voie de son candidat « prône la nécessité de trouver de nouvelles voies de développement économique et social du Sénégal se fondant sur les Valeurs que sont : le Patriotisme, le Travail, l’Éthique et la Fraternité. »

La feuille de route de la coalition Diomaye Président, qui veut gagner de manière éclatante, claire et nette dès le premier tour de l’élection présidentielle, doit se décliner sur la maîtrise du fichier électoral et/ou de la carte électorale, une mobilisation constante, la vigilance, le retrait des cartes d’électeurs, le vote massif et la sécurisation du vote le jour des élections. 19 candidats (Boubacar CAMARA, Cheikh Tidiane DIEYE, Déthie FALL, Daouda NDIAYE, Habib SY, Khalifa Ababacar SALL, Anta Babacar NGOM, Amadou BA, Idrissa SECK, Aliou Mamadou DIA, Serigne MBOUP, Papa Djibril FALL, Mamadou Lamine DIALLO, Mahammed Boun Abdallah DIONNE, El Hadji Malick GAKOU, Aly Ngouille NDIAYE, El Hadji Mamadou DIAO, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, Thierno Alassane SALL) sont en lice pour remporter cette élection cruciale du 21 mars.

Cette élection présidentielle inédite à plusieurs égards doit être transparente comme le réclament le peuple sénégalais et la communauté internationale. Le respect des règles du jeu démocratique aboutirait à la clarté du scrutin, gage d’une élection apaisée, symbole de la tradition démocratique sénégalaise. Le peuple sénégalais souverain doit décider librement et démocratiquement de celui ou de celle qui sera à la tête du pays.

Doudou Sow, sociologue, auteur et lauréat du Mois de l’histoire des Noirs

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