[ÉDITORIAL] On juge parfois un peu trop sévèrement Pastef 

De mon point de vue d’observateur, je pense qu’on juge parfois un peu trop sévèrement Pastef. 

Nous oublions que tout est inédit dans la situation actuelle du Sénégal. 

Le recul démocratique est inédit. 

Les armes politiques utilisés par le pouvoir et son parti sont inédits. 

Donc les moyens de luttes ne sont pas des gammes répétées à souhait qu’il suffit juste d’appliquer. 

Ceux qui luttent au quotidien pour déplacer ou contourner chaque pierre quotidienne sur leur route ne le font pas dans des situations normales, les chimistes parleraient de CNTP. 

Ils font face à un machiavélisme et à une méchanceté sans nom. 

Donc tout n’est pas préparé bien sûr. Il faut parfois et même souvent improviser car chaque fois que nous croyons avoir atteint le fond de l’indicible et de l’impensable, les acteurs au pouvoir continuent de creuser encore vers les abysses. 

Et de nous étonner en disant naïvement : “ils n’ont pas osé ! Il ne l’ont pas fait !”. Et bien sûr ils le fait et le referont. 

Le champ politique actuel au Sénégal n’est pas ce green jardiné à la perfection et où on joue à la régulière. Les analystes doivent intégrer cette donne dans leur appréciation. 

La sévérité de leur jugement, l’intransigeance vis-à-vis des actions et decisions de Pastef sont parfois décontextualisés.

La défense est à la hauteur des attaques subies et toute faiblesse te fait disparaître. Tout l’appareil d’État est au service du pouvoir qui a décidé d’exister seul, de régner seul. 

Les actions classiques et prévisibles comme ont pu les mener le PS et le PDS dont les leaders ont été confrontés à la machine du pouvoir ont montré leurs limites. 

Parfois Pastef est jugé un peu trop immature, un peu trop bagarreur, un peu trop virulent. 

Mais on ignore la valeur même de leur longévité face à un système aussi répressif qui te prend à la gorge, t’empêche de respirer. Si ce parti a réussi jusque-là à survivre, c’est parce qu’ils ont lutté farouchement, durement. 

On peut hypothétiquement penser qu’avec moins de virulence, leur leader ne serait pas en prison aujourd’hui. 

Que s’ils avaient transigé, ils seraient encore indemnes. 

Mais hypothèse pour hypothèse, s’ils avaient mis la pédale douce, peut-être que le 3ème mandat passerait comme lettre à la poste. 

Que le parti au pouvoir n’aurait même pas besoin de déployer le quart des ressources jusque-là utilisées pour en arriver à ce stade.

Qu’ils pourraient parader à l’international sans arrière pensée. 

Qu’au delà de l’opposition, ce sont les Sénégalais même qui seraient réduits à leur plus simple expression. 

Si le Pastef n’avait pas autant de ressources en son sein, s’il n’était pas aussi structuré, ils n’en seraient pas encore là ; ils n’envisageraient pas de candidatures alternatives en plus de celle de son leader pour qui le combat continue malgré son emprisonnement. 

Certains reprochent à Pastef de ne pas s’être battu dans la rue pour libérer son leader quand d’autres lui reprochent son jusqu’au-boutisme. 

Mais peu sont enclins à participer aux manifestations autorisées ou non par l’État répressif. 

C’est toujours plus facile de juger depuis les tribunes. 

C’est la meilleure des places qui autorise toutes les postures. Cela permet de juger les joueurs, l’arbitre, l’état du terrain et même la météo. 

Pastef vit en somme, la fable du meunier, de son fils et de l’âne.

Il nous faut apprendre à analyser avec ce contexte pour ne pas toujours leur reprocher de ne pas être sur nos postures collectives tout aussi  contradictoires qu’intenables. 

Mais tout cela bien sûr est politique-fiction et nous avons tous le droit d’être scénariste…

Le militant inconnu

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